Classe d'actifs en vue: obligations

Les obligations d'Etat sont considérées comme ennuyeuses et ne sont recommandées de nos jours que pour des raisons de diversification. Mais il n'en fut pas toujours ainsi. Cette catégorie de placement a en effet presque 40 années de marché haussier derrière elle.

Pas sept mais quarante années de vaches grasses

Nous connaissons tous la parabole des sept années de vaches maigres et des sept années de vaches grasses. Au sens large, il est question de cycles qui peuvent notamment s'appliquer aussi à l'évolution de l'économie (cycles conjoncturels). On observe également des cycles sur les marchés financiers. Parfois, ceux-ci durent toutefois nettement plus que sept années. Nous avons pu observer l'un des marchés haussier les plus impressionnants avec les obligations d'Etat. Celui-ci a commencé au début des années 1980 et s'est prolongé à proprement parler jusqu'à aujourd'hui. Cette évolution a été rendue possible par le recul continu des taux d'intérêt.

Evolution des bourses et de l’inflation avec l’exemple du Swiss Market Index (janvier 2000 à décembre 2019)

Sources: Bloomberg, CIO Office Raiffeisen Suisse

Aux USA par exemple, les rendements des obligations d'Etat à 30 ans (US-Treasury Bonds) se situaient à un incroyable niveau de 15 % fin septembre 1981. Quiconque avait ainsi acheté cette obligation à l'époque a pu encaisser un rendement annuel de 15 % pendant une durée de 30 ans. Au cours de la même phase, les investisseurs en actions durent se satisfaire d'un rendement plus maigre en comparaison de «seulement» 12,3 % et ce, en devant prendre en compte une volatilité nettement plus élevée.

Bien que de nombreuses banques centrales aient abaissé les taux d'intérêt à court terme vers la barre de 0 %, voire au-dessous, au cours des années passées, un investissement dans les obligations d'Etat aurait aussi valu le coup cette année. Les nouvelles baisses de taux d'intérêt de 150 points de base au total par la Réserve fédérale américaine (Fed) en mars 2020 ont entraîné une hausse des cours de près de 24 % de l'US-Treasury Bond à 30 ans. Toutefois, la fin des (entretemps 40) années de vaches grasses se dessine toujours plus précisément pour les investisseurs en obligations. Techniquement, les banques centrales sont pratiquement arrivées aux limites de leur marge de manœuvre en matière de taux d'intérêt. Les taux d'intérêt négatifs de 1 % sont généralement qualifiés de limite «la plus inférieure». A partir de ce niveau, il devrait devenir impossible pour les banques commerciales de continuer à prélever des taux d'intérêt négatifs sur un large front: avec la conséquence que de nombreux épargnants retireraient probablement leur argent des comptes. Un risque incontrôlable, que les banques centrales veulent éviter. Sans baisse supplémentaire de taux d'intérêt, le rendement d'une obligation correspond au rendement à l'échéance lors de l'achat. Et celui-ci est entretemps négatif pour de nombreuses obligations qui sont considérées comme sûres. Face à ce contexte, nous considérons les obligations (d'Etat) comme non attractives, même si nous n'attendons pas de marché baissier prochainement. Pour cela, il faudrait en effet qu'une inversion de tendance s'amorce avec les taux d'intérêt, et celle-ci ne se dessine pas (encore) jusqu'ici.