L'accompagnatrice RCE Ibi Bertschi a beaucoup d'expérience avec les PME issues du commerce de détail et du commerce spécialisé, qui ont osé faire le pas de l'e-commerce. Ibi Bertschi nous explique comment une PME peut se préparer au mieux à son entrée sur le commerce en ligne et quelles sont les erreurs à éviter.
Madame Bertschi, une boutique en ligne est-elle aujourd'hui vraiment indispensable à une PME?
Ibi Bertschi: Vouloir instinctivement ouvrir une boutique en ligne pour faire comme les autres est une mauvaise stratégie. L'entrepreneur doit d'abord s'interroger sur la pertinence d'un tel canal de distribution pour son activité. Je constate malheureusement souvent une mise en œuvre précipitée, et donc vouée à l'échec.
Dans quels secteurs d'activité les boutiques en ligne sont-elles devenues incontournables?
I. B.: Dans le commerce de détail, car le consommateur veut pouvoir faire ses achats sur Internet. En revanche, les médecins, coiffeurs ou avocats privilégient encore beaucoup le contact direct, bien que les clients ou patients potentiels recherchent également des services en ligne au niveau local.
I. B.: Aujourd'hui, l'ère du digital s'impose et aucun secteur d'activité ne peut contourner cette réalité. Tout ce qui peut être digitalisé le sera tôt ou tard – ou sera du moins assisté par voie digitale. Tout comme nous le vivons depuis des décennies pour de nombreuses autres évolutions, comme dans la téléphonie. L'annuaire sur papier fait aujourd'hui partie du passé. Les activités commerciales doivent pouvoir s'adapter à tous les domaines. En effet, des concurrents du monde entier pénètrent de plus en plus le marché suisse par le biais de ces nouveaux canaux.
Quel est le retour sur investissement d'une boutique en ligne?
I. B.: En créant sa propre boutique en ligne, une PME fait souvent ses premiers pas dans l'univers du digital. Elle espère ainsi accroître son activité et obtenir des avantages par rapport à la concurrence. Et il y a désormais une montée en puissance d'entrepreneurs qui développent de nouveaux modèles d'affaires digitaux. Ce sont en majorité des prestataires de services. Vous pouvez désormais organiser votre déménagement sur Internet, collecter de l'argent pour vos projets, être coaché en ligne ou trouver un artisan sur une plateforme d'échange, pour faire repeindre votre appartement. L'investissement dans une boutique en ligne ouvre une nouvelle dimension et touche de nouveaux clients, qui n'auraient peut-être pas pu être acquis par un canal de distribution classique.
Quelle est la situation dans le secteur du B2B?
I. B.: Le commerce en ligne convient également pour les PME du secteur du B2B. Les produits et services standardisés, tels que les fournitures de bureau, les consommables et les produits alimentaires pour le secteur de la restauration, sont particulièrement adaptés à la vente en ligne. La situation devient plus complexe lorsque le modèle d'affaires exige un haut degré de spécialisation et un produit adapté au client, notamment dans la construction de machines.
Une boutique en ligne peut-elle également être rentable pour une petite entreprise?
I. B.: En fonction de la spécialisation et de la disponibilité des produits, une boutique en ligne comme canal de vente supplémentaire peut aider à soutenir les ventes et augmenter la notoriété de l'entreprise. De nombreuses petites entreprises utilisent déjà cette stratégie multicanal. Il existe également des plateformes telles que Farmy, à laquelle des exploitations agricoles et des boucheries peuvent s'associer. Le consommateur achète en ligne et est livré directement par le producteur, partout en Suisse! L'entreprise individuelle se soucie ainsi moins des activités marketing et peut se consacrer à son cœur de métier: la production et la vente directe de ses produits.
Quel conseil donneriez-vous aux PME?
I. B.: Misez sur le qualitatif plutôt que le quantitatif: commencez en vous positionnant clairement sur le marché, et en privilégiant une petite gamme exclusive de produits et de services de haute qualité.
Je ne peux donc pas présenter l'intégralité de ma gamme sur ma boutique en ligne?
I. B.: Si, mais uniquement si les produits sont disponibles et que cela apporte un réel bénéfice au client! En tant qu'entrepreneur, je dois cependant me demander si ma gamme fonctionne aussi bien en ligne. Je conseille de repenser entièrement le comportement du client à l'avenir et de réfléchir à la façon de s'adresser à lui. L'ancien modèle, correspondant à tout basculer sur une boutique en ligne, aboutit rarement au résultat escompté. Notamment lorsque la gamme de produits est vaste, la maintenance du site atteint vite ses limites.
Quelles sont les erreurs que commettent les PME?
I. B.: Comme c'est souvent le cas, les entrepreneurs font tout par eux-mêmes après la journée de travail et le week-end. Ils ne demandent pas l'aide de professionnels et sous-estiment le temps de travail nécessaire. L'expérience client et la logistique doivent fonctionner en parfaite cohérence, il faut une présentation attractive des produits et le consommateur doit pouvoir trouver votre boutique en ligne et la préférer à d'autres. Si le consommateur n'y trouve pas de valeur ajoutée ou si l'achat sur Internet n'a aucun sens, même la plus belle des pages d'accueil restera sans aucune utilité.
Quelle est la meilleure façon de commencer?
I. B.: Tout d'abord, analyser son modèle d'affaires, puis définir les différentes possibilités et leur donner un ordre de priorité. De nombreuses PME trouvent une aide en débattant de leurs idées avec d'autres entrepreneurs, afin de ne pas perdre de vue leurs objectifs. Au Raiffeisen Centre des Entrepreneurs, nous proposons des ateliers sur la digitalisation. L'objectif de ces ateliers n'est pas de proposer une solution prête à l'emploi, mais d'accompagner l'entrepreneur tout au long de son processus de décision. Pourquoi ne pas apprendre des autres et éviter ainsi quelques pièges?
Et si je décide ne pas opter pour le commerce en ligne?
I. B.: Selon le type d'entreprise, la vente stationnaire restera la solution la plus appropriée. Dans ce cas précis, il faudra savoir écouter son intuition et faire preuve d'esprit d'entreprise. De nombreux clients apprécient également un partenaire spécialisé, fiable et gérant un point de vente stationnaire. Tous ceux qui ne disposent pas de leur propre boutique en ligne mais souhaitent profiter des avantages de l'e-commerce peuvent commercialiser leurs produits via des plateformes sectorielles reconnues, comme Galaxus ou Farmy.ch.
Conseils sur la digitalisation des processus au RCE
Ibi Bertschi est accompagnatrice au RCE de Gossau depuis début février 2016. Originaire du canton de Thurgovie, Ibi Bertschi a grandi dans l’entreprise de garage de ses parents et connaît le monde de l'entreprise depuis toute petite. Elle dirige sa propre entreprise depuis plus de 18 ans et conseille les PME pour qu’elles gagnent en efficacité et en efficience sur le marché.