L'objectif de toute garantie consiste à émettre un signal positif

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Les garanties ne sont que rarement versées. Volker Käseborn, responsable Export Finance & Garanties chez Raiffeisen Suisse, et René Brugger, Responsable thématique Stratégie et modèles d'affaires digitaux du RCE, nous expliquent son véritable objet: présenter le donneur d'ordre comme un partenaire commercial digne de confiance, et permettre ainsi de nouvelles relations d'affaires.

 

Le coronavirus a provoqué beaucoup de changements. Quel a été l'effet de la pandémie sur le besoin de sécurité des entrepreneurs suisses?

Volker Käseborn: Quand le marché est dans l'incertitude, le besoin de sécurité augmente. C'est certainement le cas actuellement. Mais je resterais prudent quant au fait d'imputer ce phénomène à la pandémie de covid-19 uniquement. Il y a plusieurs facteurs qui influencent les relations commerciales internationales. Et la façon de réagir à ces incertitudes diffère selon les secteurs, selon les entrepreneurs.

René Brugger: Selon mon expérience, le besoin de sécurité en termes de planification augmente avec le degré de complexité des opérations. C'est le cas notamment pour le secteur de l'industrie mécanique, avec un réseau dense de fournisseurs et de clients.

 

Est-ce aussi évident en matière de garanties?

R.B.: Une garantie est très utile lorsque les conditions du marché sont incertaines. C'est un outil puissant qui vous permet, en tant que partenaire commercial, de prouver votre fiabilité et votre solidité, et de garantir les services ou paiements. Un client qui verse un acompte sans aucune forme de garantie offre un gage de confiance unilatéral. Or peu d'entrepreneurs peuvent se le permettre – surtout en ces temps de pandémie. Dans l'industrie des machines en particulier, des acomptes importants doivent souvent être versés au moment de la commande, que le fournisseur doit assurer à travers une garantie de restitution d'acompte.

 

Avez-vous constaté une augmentation de l'intérêt porté aux garanties?

R.B. : Oui. Il y a davantage d'entretiens autour de ce thème dans les Raiffeisen Centres des Entrepreneurs. Mais cela ne s'explique pas seulement par la pandémie – c'est plutôt un signe des temps. L'internationalisation est devenue un sujet central pour de plus en plus de PME. C'est d'ailleurs ce que confirme clairement la dernière étude sur les PME réalisée par Raiffeisen et l'association swiss export. Grâce aux garanties, Raiffeisen peut soutenir les entreprises et contribuer au succès de leurs affaires à l'étranger.

V. K.: Effectivement, parce que dans le commerce international, les garanties sont quasi obligatoires pour obtenir des contrats ou des commandes, coronavirus ou pas. Impossible de décrocher un contrat sans présenter une garantie de fournisseur ou de restitution d'acompte.

 

Les défauts de paiements ou de services qui entraînent le versement des garanties sont-ils fréquents? 

V. K.: Dans la pratique, c'est très rare: nos clients entretiennent généralement des relations d'affaires très stables et durables. Théoriquement, en ces temps troubles, le risque est certainement un peu plus élevé qu'un partenaire commercial fasse appel à une garantie par simple manque de liquidités. Un choix imprudent toutefois, car au-delà des conséquences juridiques, cela ruinerait pour toujours la confiance de ses partenaires. Un tel unfair calling ne se produit pour ainsi dire jamais.

R.B. : De toute façon, le but n'est pas l'appel de la garantie. A mon avis, l'effet d'annonce d'une garantie est bien supérieur à sa valeur intrinsèque. Elle signale en effet: «Je bénéficie de la confiance d'une banque réputée, ce qui fait de moi un partenaire commercial digne de confiance.»

 

Quelle est l'importance du choix de la banque émettrice de la garantie?

V. K.: Il est très important! Plus le rating de la banque est élevé, plus la garantie inspire confiance. Le bénéficiaire veut être sûr que la banque est en mesure de payer s'il fait appel à la garantie. Si une petite banque inconnue se porte garante de plusieurs millions, personnellement, je m'en méfierais.

R.B. : Il est donc important que Raiffeisen Suisse se positionne elle aussi en tant qu'émetteur de garanties, en plus des Banques Raiffeisen indépendantes. Les entrepreneurs trouveront ainsi le bon partenaire pour chaque volume d'affaire.

V. K.: Le label «Suisse» revêt une importance capitale. C'est un gage de qualité supplémentaire à l'étranger.

 

Existe-t-il des alternatives aux garanties?

V. K.: En Suisse, le cautionnement est très répandu, notamment pour les contrats entre les entreprises privées et le secteur public. Cela dit, avec un cautionnement, le bénéficiaire a moins facilement accès à son argent car des oppositions sont possibles, et les éventuels différends doivent être réglés avant le paiement.

R.B. : Les conseils avisés et l'expertise éprouvée restent le meilleur moyen de se protéger: à quoi ressemble mon marché cible? Que sais-je de mes nouveaux partenaires d'affaires? Quelles conditions-cadres et pratiques juridiques dois-je prendre en compte? A quels instruments de financement ai-je droit?

 

Il est certainement plus facile aux grandes entreprises qu'aux PME d'acquérir ces connaissances.

R.B. : Je ne dirais pas cela. L'internationalisation n'est pas réservée aux grandes entreprises. Les PME doivent peut-être rechercher un soutien externe si elles ne disposent pas de spécialistes de l'exportation. Les conseillers des RCE ou de la Banque Raiffeisen peuvent jouer un rôle important, en leur exposant toute la gamme des instruments de garantie et de financement. 

 

Comment cette gamme évoluera-t-elle, d'après vous? Quel rôle joue la digitalisation?

V. K.: Nous tendons vers l'automatisation accrue des processus. Certaines banques acceptent les demandes numériques de garantie. Ces démarches vont dans le bon sens. Mais je ne crois pas à une automatisation totale de la garantie. Les réticences de notre clientèle seraient bien trop importantes.

R.B. : Je suis bien d'accord. Comme je l'ai déjà dit, la confiance joue un rôle majeur dans l'octroi d'une garantie bancaire. C'est une affaire de relations humaines, et pas une décision prise par une machine.

V. K.:  Je m'attends donc à des innovations non pas en matière de traitement des garanties, mais plutôt du côté des produits. Par exemple, les garanties sont de plus en plus populaires dans le secteur des services. Le commerce en ligne est également un domaine prometteur. Pour en revenir au coronavirus: la pandémie a entraîné un boom du commerce en ligne mais elle a également mis au jour les failles des chaînes d'approvisionnement internationales. Il est bien probable que les garanties seront de plus en plus demandées, dans ce domaine aussi.

Volker Käseborn, responsable Garanties & Export Finance, Raiffeisen Suisse.
Volker Käseborn, responsable Garanties & Export Finance, Raiffeisen Suisse.

Volker Käseborn est diplômé de commerce et expert en relations commerciales internationales. Il dirige le secteur Export Finance & Garanties de Raiffeisen Suisse.

René Brugger, Responsable thématique Stratégie et modèles d'affaires digitaux
René Brugger, Responsable thématique Stratégie et modèles d'affaires digitaux

L'automatisation et la digitalisation caractérisent le parcours de René Brugger. Il a dirigé des entreprises d'automatisation actives au niveau national et international et compte parmi les pionniers du mouvement de l'industrie 4.0 en Suisse. Comme conseiller indépendant, il a accompagné avec succès des entreprises de renom sur le chemin de la transformation digitale.